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57 quelles sont nos résistances ?

Pour tous ceux et celles qui n’ont pas eu la chance d’assister au Cabaret Mystique,
extrait de la conférence d’Alexandro JODOROWSKY du 22 janvier 2005 (5) à la librairie « les Cents Ciels »

Pourquoi souffre-t-on ? Il y a des résistances en nous.

 résistance au corps : on a peur d’utiliser le corps dans toute son extension.
 on résiste au sexe, on a honte de ne pas créer. Cela vient de la religion qui a dit pendant des siècles que la femme c’était le Diable. On a honte d’épanouir sa sexualité, car le monde masculin en a une peur bleue.
 on résiste à l’émotionnel, on a honte de développer des sentiments sublimes.
 on résiste à avoir des pensées sublimes cela fait honte. Donc on ne se le permet pas. Dire que la vie c’est la merveille des merveilles des merveilles.

Le pire qu’on peut nous faire c’est nous voler l’enfance, quand les parents deviennent les enfants de leurs enfants « des parents toxiques ». On ne peut pas décider de mettre un enfant dans un monastère et de décider qu’il ne fera pas l’amour parce qu’il est un moine.

Gandhi, lui, dit qu’une femme a plein droit d’avoir une vie politique comme un homme, c’était un féministe merveilleux.

 on a une résistance à l’espace. On nous met dans des cubes et on nous a limité l’espace de plus en plus. On ne vit pas dans l’espace que l’on mérite et on vit dans une architecture virile, phallique, écrasante, toujours avec des limites rationnelles, industrielles qui nous empêchent la joie de vivre. Parmi les plus grands criminels de notre siècle il y a les banquiers, les industriels et les architectes. Ce sont des profiteurs et des complices d’un système qui est caduque. Pensez à combien de m2 vous méritez de vivre.

 on nous donne aussi un stress au Temps, on nous dit que la vie est courte. A partir de 70 ans on nous dit que les hommes ont des chances de mourir et les femmes à 77 ans.

J’ai 76 ans et je me sens très bien. La vieillesse est une merveille comme la jeunesse est une merveille. Dites-moi : « combien de temps vous allez vivre ? à quel âge vous allez mourir. Quel est le minimum de vie que vous vous donnez ? ». Les femmes pensent que la vie dure 50 ans car après elles ne sont plus désirables. Après c’est la ménopause et on arrête d’être femme. Mais l’orgasme continue.
Mon père est mort à 100 ans. Mais pourquoi pas 150 ? Dans la bande dessinée que je fais sur les Borgia, les gens mourraient à 40 ans. Au Moyen age, à 35 ans on était un vieillard. Mais moi je sens que je commence ma vie.

La mort n’existe pas, on ne va jamais mourir. Ce sont des changements. Pourquoi parler de fin. La vie n’a pas de commencement et n’a pas de fin. Alors je vais vivre tout ce que j’ai à vivre sans m’auto détruire le mieux possible, le plus possible. Le soufisme dit « devant Dieu, vis comme si tu avais 10 secondes et devant les hommes comme si tu avais 10.000 ans ». Fais des plans à longue portée. Quand je vais à la Banque ils pensent que je vais mourir bientôt et ils ne me prêtent pas de l’argent. Mais peut-être ils vont mourir avant moi. Mon père à 70 ans a abandonné le Chili et est parti en Israël, il a eu une nouvelle femme et deux autres enfants et est mort à 100 ans. Quand il est parti on a dit qu’il était fou, que sa vie était finie, mais il a vécu, il a fait toute une famille. Si à 70 ans il avait dit que sa vie était finie, il n’aurait jamais rien fait.

J’ai commencé seulement à faire de la Bande dessinée à 50 ans et maintenant je suis une star dans le monde entier en ce moment. Et j’ai commencé à publier des livres à 68 ans et la poésie à 70 ans « l’Echelle des Anges » 6000 exemplaires.

 on nous limite dans la conscience, on nous rend bêtes avec le cinéma et la TV américaines. C’est très amusant, mais on sort idiot. On rentre idiot et on sort idiot. On pourrait demander à l’art que tu rentres idiot mais que tu sortes un tout petit peu illuminé.

 on a le stress à la vie, car on a peur du changement, on est négatif à tout changement. Mais acceptons les changements, ils sont bons. Il faudrait dire que cette pensée ne m’appartient pas, m’est étrangère, mais elle est bonne et pas l’inverse « c’est bon, mais cela ne m’appartient pas ». On peut faire un sandwich « ça c’est bon mais ne m’appartient pas, mais cela fait du bien au monde auquel je participe ». On arrête la critique.

Méditez. Maintenant je veux faire de l’art pour guérir. Si quelque chose est utile pour vous dans cette conférence, je suis ravi.

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