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96 - les bons gestes de survie : extraits de la conférence du 21 janvier 1998

Pour tous ceux et celles qui n’ont pas eu la chance d’assister au cabaret mystique d’Alexandro Jodorowsky,

Je prends des thèmes pour ces conférences et elles s’en vont. Mais suppose que quelque part dans l’univers mes conférences restent. Alors je fais des cycles. Aujourd’hui je suis dans le cycle du « chasseur », comment on chasse et comment on est proie. Pour ceux qui viennent pour la première fois je vais faire un petit résumé parce que je veux avancer dans le thème.

J’ai pensé qu’avant l’instinct sexuel il y a l’instinct de survie et que nous sommes tous des chasseurs, sauf que dans notre société nous ne chassons plus, mais cela nous reste d’être chasseur. C’est intéressant de voir aussi qu’il y a les herbivores qui ne chassent pas mais qui mâchent et qui sont les proies. Alors les carnivores arrivent et les herbivores sont là. Les carnivores sont solitaires, ils font le guet, puis ils attaquent tandis que les herbivores sont en groupe, et il y en à un qui surveille et quand il donne l’alerte tous s’échappent. Alors il y a les uns qui guettent et les autres qui s’échappent. La rapidité du chasseur est importante pour attraper sa proie. Il faut que son but soit clair et si le but est clair il y va, si le but n’est pas clair, il rate.

J’ai pensé que nous étions comme cela : on est en partie guetteur, on sort chasser intellectuellement des idées, on sort chasser des émotions, chasser des désirs, du travail …on va à la chasse et ce qui est important c’est guetter le moment précis de la frappe pour attraper la proie. Et quand on est proie il faut faire très attention, voir quand le danger arrive pour s’échapper. Alors il y a des personnes qui passent toute leur vie à s’échapper. Ils ont des tendances herbivores.. J’ai déjà parlé de tout cela.

Après j’ai parlé des attitudes vitales :
Il y a des personnes qui ne changent pas, d’ autres qui changent une chose pour une autre : les révolutionnaires, aujourd’hui ils sont communistes, demain ils sont capitalistes. Ou bien on se transforme ou bien on fait une mutation, on n’est plus jamais le même. Quand on n’est plus jamais le même vient une immense difficulté : toutes les personnes qui sont autour de toi n’acceptent pas que tu ne sois plus le même. Moi, cela m’arrive avec mes fils. Tout le temps il y en a un qui me dit « écoute, je ne suis plus un enfant, je suis un adulte, arrête de me traiter comme un enfant » . Il y a une mutation de l’adolescent mais les parents ne se rendent pas compte de la mutation.

Deux histoires pour vous montrer que les parents ne se rendent compte de rien avec les enfants.

Ces histoires d’enfants viennent d’un curé qui est en Inde et qui raconte :

La petite fille est à la plage avec sa mère

  • maman, est-ce que je peux jouer dans le sable ?
  • non, ma belle, je ne veux pas que tu salisses tes habits
  • est-ce que je peux me baigner ?
  • non, tu vas te mouiller et attraper un rhume
  • est-ce que je peux jouer avec les autres enfants ?
  • mais non, tu vas te perdre en allant jouer avec eux
  • maman, achète-moi une glace..
  • non, cela te fait mal à la gorge..

alors la petite fille se met à hurler et la mère dit : « mon dieu, vous avez vu quelle petite fille névrotique j’ai !! »…

une autre histoire :

  • comment vont tes fils ?
  • les deux vont très bien, merci
  • quel âge ont-ils ?
  • le médecin a 3 ans, l’avocat 5 ans.

Les parents ne laissent pas vivre les enfants.

Quand tu as un changement en toi, le problème c’est l’autre, ce n’est pas toi. Il faudrait que l’on t’accepte comme tu es. Voilà.

Aujourd’hui je vais continuer le thème du changement. Je vous dis ce qui me semble le plus utile pour vous et là vous allez voir, je pense, les différents niveaux de la création artistique, comment on prend la vie à différents niveaux. J’espère que cela va être utile pour vous, pour moi cela a été hyper-important.

Dans le premier degré : échapper à la persistance.

Cela veut dire qu’il y a le chasseur qui veut la proie et la proie qui évite le chasseur. L’un passe sa vie à guetter et l’autre passe sa vie à éviter qu’on le chasse. L’araignée, par exemple, essaie toute sa vie de chasser la mouche qui essaie toute sa vie de s’échapper. Donc rien ne change. L’ego passe toute sa vie à s’échapper des appels intérieurs que nous avons. En nous il y a toute la valeur qui nous appelle et nous nous en échappons, il y a l’amour qui nous appelle et nous nous échappons, il y a la divinité, quelle qu’elle soit, qui nous appelle, nous nous échappons, il y a la joie de vivre qui nous appelle, nous nous échappons. C’est à dire qu’on pense que l’on est chasseur mais on est la proie, on est cherché par tout ce qui est à l’intérieur de nous, mais la conjonction ne se fait pas. On ne change pas.

Tout ce que je vous dis, je me le dis à moi-même. Au fond dans ces conférences, je viens apprendre. Ce que je vous dis je n’y avais jamais pensé avant, cela me vient comme cela.

Quand on commence à avoir des relations avec des ami(e)s ou des personnes vous allez vous rendre compte qu’il est très difficile de changer quoique ce soit en vous. On est comme un ordinateur avec sa disquette. Chacun de nous a une disquette et pour vraiment pouvoir faire autre chose il faudrait changer de disquette. Et c’est immensément difficile de faire changer de disquette à quelqu’un…C’est très difficile aussi, en nous-même, de voir quelles sont les disquettes qu’on a dans la tête. Il faudrait que quelqu’un nous fasse voir de l’extérieur que notre système de conduite est mécanique. « Essaie de la changer, quand même ! » C’est très difficile, on ne peut pas. Si quelqu’un t’aide il faut vraiment qu’il soit en état de sainteté, parce que souvent quand on essaie de t’aider on te fait des dommages. C’est toi qui doit prendre ta disquette et t’en mettre une autre, vierge. Mais c’est très, très difficile. Il faudrait écouter celui qui nous dit qu’il faudrait changer notre disquette, mais à ce moment là l’orgueil et la susceptibilité arrivent : « pourquoi tu m’insultes, pourquoi tu me dis cela ! ce n’est absolument pas vrai » et la disquette se met à marcher pour prouver que vraiment ce n’est pas vrai. Et le changement ne se fait pas. On a des mouvements d’angoisse qui nous amènent soit à la multiplication du problème, à la division ou à l’incrustation du problème et je ne me transforme pas. Et je vis comme je crois que je suis et je lutte farouchement pour être ce que je crois que je suis, et qu’on ne vienne pas m’embêter ni me faire des critiques, car alors je deviens furieux. La grande susceptibilité et les pleurs ce sont des défenses pour ne pas changer ce qu’on croit que l’on est. Ce qu’on croit que l’on est, c’est toujours misérable et douloureux. On est dépressif, on prend des pilules, on ne sait plus quoi faire, mais on défend ce qu’on est ! C’est à dire qu’on défend sa misère, on se justifie.

Je refuse ce qui n’est pas moi. Il faut que les choses soient comme moi pour que je les accepte. La base la plus basse de cela, c’est le racisme, mais il y a du racisme aussi dans les idées : celui qui ne pense pas comme moi, c’est un imbécile, celui qui ne ressent pas comme moi, c’est un idiot, celui qui a une sexualité contraire à la mienne, c’est une catastrophe, bande d’abrutis ! Et là je répète comme dans un cercle hypnotique. Dans cette situation c’est la persistance de ce que l’on croit que l’on est. Dans toutes les pièces de théâtre c’est comme cela : Macbeth est Macbeth jusqu’à la fin de l’œuvre. Cela serait impensable de penser que SHAKESPEARE ferait que Hamlet devienne un Bouddha. Tout d’un coup Hamlet s’illumine et fait « AUM ! ». C’est de l’impensable que Don Quichotte devienne Sancho Pansa ou l’inverse. CERVANTES a essayé mais il n’a pas pu le faire. C’est la persistance du caractère. L’art est malade de la persistance. Toute la politique est malade de la persistance. Toute la vie amoureuse est malade de la position du missionnaire ; non, non, de la persistance ! On persiste pareil ! Donc la persistance c’est vraiment un danger. Quand on est dans la rue on peut voir que celui là est resté dans la façon dont il s’habille dans les années 1960, celui-là en 1968, celui-là 1980, celui là en 1500, parce que chaque personne porte une certaine époque dans la tête, on n’est pas tous dans le même siècle. Il faudrait sortir de la forêt et voir à quelle époque vivent les gens, car ils sont persistants, ils ne changent pas.

Dans le deuxième degré c’est la transformation.

Je ne persiste pas, je me transforme, j’accepte de me transformer. Je suis une victime heureuse. La mouche accepte de se faire manger par l’araignée ou l’araignée accepte que la mouche s’échappe. Je suis une victime qui a de la patience. Cela m’arrive, je ne sais pas comment mais instinctivement, moi, je me transforme.

C’est l’histoire de Bouddha : il y avait un faucon qui poursuivait une colombe et Bouddha a mis la colombe sur lui. Le faucon lui dit : « oui, oui tu es bon avec la colombe, mais tu es méchant avec moi parce que moi je n’ai rien à manger maintenant ! » alors Bouddha a dit : « non, non, je te donne un morceau de ma jambe du poids de la colombe. » Mais la colombe était plus lourde : il a coupé un autre morceau. Mais la colombe était plus lourde, il a donné toute sa jambe. Puis il a donné un bras etc.. et il s’est rendu compte qu’il ne s’agissait pas de donner un kilo, qu’il s’agissait de donner une vie. Il fallait donner toute sa vie cela valait pour toute la colombe, car les vies sont des vies, ce ne sont pas des morceaux de corps.

Alors s’il y a des chasseurs, c’est une loi de la Nature et s’il y a des proies, c’est une loi de la Nature. Je suis un animal mais une proie et je m’échappe, mais il y a un moment où je ne peux plus m’échapper, le lion est là, à 10 mètres. Alors l’animal se donne, il se donne sans discussion, tranquille. Il se donne en sacrifice car il sait que c’est la loi de la Nature qu’on le mange. Il se donne à la transformation car il sait très bien qu’il va devenir lion. Le lion va le manger, l’absorber, le transformer. Alors il accepte de se transformer. La proie sait perdre et fait de l’acte de perdre un triomphe parce qu’il fait un sacrifice. Les gens qui sont évolués, ce n’est pas mon cas, savent mourir. Il savent perdre. On est cherché, on est cherché par l’Infini qui tout d’un coup nous a. On est malade, on ne peut plus se défendre. A ce moment là, on sait perdre, se donner, on se rend, tranquillement, je me rends. Cela s’appelle sacrifice.

Dans les Evangiles, quand le Christ est pris, il boit la coupe jusqu’à la lie et il ne va pas pleurer et se plaindre. « Père, pourquoi tu m’as abandonné ? » Ce n’est pas comme cela. Il se laisse crucifier et lit le psaume 22 qui commence par « Père, pourquoi m’as-tu abandonné ? » mais qui finit par « je vais être le Roi des nations » car derrière moi il y a le Père et je vais ressusciter dans trois jours. Je me donne en paix au sacrifice pour que les hommes sachent à l’avenir, qu’il ne faut pas faire cela. Pas de problème. Je me donne au changement car je sais que je vais renaître dans un corps de lumière. Je vais être un autre, je me donne à la transformation.

L’autre côté, c’est le guetteur et à un moment donné la proie va plus vite que lui et tranquillement il s’en va. Il ne dit pas « j’ai raté, je n’ai pas eu mon bac, je n’ai pas eu ce travail, la femme que je voulais ne voulait pas de moi !! » Non. Il sait perdre le chasseur, il perd avec une dignité incroyable. « je te quitte, au revoir ». Il perd avec joie car il sait que l’autre va réaliser la vie, que c’est la loi de la Nature. Alors il ne passe pas toute sa vie à dire « j’ai perdu, j’ai perdu ». Un chasseur n’est jamais perdant car chaque proie qui s’échappe c’est un changement et il redevient guetteur de nouveau. Il guette une autre proie et il oublie l’autre car ce n’était pas pour lui. Il sait perdre et la proie sait s’abandonner. On sait perdre à l’intérieur de nous.
Par exemple, je voulais faire du théâtre et je n’ai pas fait de théâtre mais je ne peux pas me considérer comme un acteur raté, je me considère comme quelqu’un qui a changé de chemin. J’allais faire un film, je n’ai pas fait ce film et j’ai changé en faisant des bandes dessinées. Je chasse tout de suite autre chose. Alors il n’y a pas d’échec, il y a des changements de chemin. Si avec dignité on perd une chose, on passe à une autre. C’est cela qui est bon dans ce chapitre là.

La troisième position : quand on accepte la transformation intérieure après on transforme l’autre.

C’est la transmutation. Je te transforme, je suis la cause de ton changement. Avant dans la transformation je ne savais pas comment. Là je sais comment je peux te transformer. J’ai gagné ce pouvoir de transformation avec mon travail conscient. J’ai consciemment travaillé sur moi. J’ai arrêté de me défendre, d’être auto complaisant et susceptible. J’ai commencé à remercier chaque fois qu’on me dit un de mes défauts. Je l’écoute soigneusement et cela me donne l’opportunité de me transformer. Chaque critique qu’on me fait, c’est un cadeau qu’on me fait. Si la critique n’est pas juste, je la laisse de côté, mais si la critique est juste je l’utilise.

Charlie Chaplin avait un papier pendant qu’il filmait et un ami lui a dit « est-ce que je peux voir ce que tu as là ? » C’était une critique épouvantable contre lui. « mais tu as plein de bonnes critiques pourquoi tu gardes seulement celle là ? » - « Mais c’est parce que les bonnes critiques ne me servent à rien tandis que celle-là est formidable pour moi, elle me sert beaucoup ». Il était dans la troisième position.

Quand je ne me transforme pas je suis la matière première en Alchimie. Quand je me transforme je deviens la pierre philosophale. J’ai transformé la matière, j’ai fait une chose spirituelle hyper puissante. Quand je passe au troisième stade la pierre philosophale change par son contact les métaux en or, le métal vil est changé en or. Où que ce soit, la personne qui arrive au troisième degré provoque un changement dans l’autre. Cela veut dire que quand on ne change pas c’est néfaste, quand on se transforme, c’est bon, mais ce n’est pas assez. Après il faut arriver à un état où ton être par le contact va faire que les autres s’éveillent au travail conscient que tu as fait. Maintenant tu es un agent de changement. On va sentir que cette personne t’apporte et te change. (le Christ et les pêcheurs). D’un jour à l’autre tu reçois à l’intérieur de toi les valeurs que ta mère et ton père ont essayé de te scier. Tes vraies valeurs apparaissent. Chacun de nous est un trésor.

Dans la position n° 1 j’ai des cauchemars. Quand je me transforme je commence à avoir de bons rêves et quand je passe à la troisième position où je suis transformateur j’ai des rêves lucides c’est à dire que dans le rêve je sais que je rêve et je transforme mes rêves. Je ne peux pas rêver d’une chose que je ne ferai pas dans la vie éveillée, je suis le même, il y a une unité entre moi et le rêve. J’arrête d’avoir des cauchemars, j’arrête d’avoir de belles illusions, je transforme ma réalité, je la fait fructifier. Tout ce qui est autour de moi fructifie. La personne dans la troisième position produit la poussée des pensées, des émotions positives, la poussée de la réalité. Je suis le contraire d’Attila : là où il passait l’herbe mourait. Où le Christ passe, les plantes poussent. C’est le contraire. Je pourrais le dire aussi bien le Bouddha.

Dans le premier degré la personne est vraiment une victime, quand tu te transformes tu deviens un héros et dans le troisième degré tu es magicien. La magie apparaît.

Il y a encore un autre degré. Au fur et à mesure que j’avançais à trouver ces degrés, j’avais une joie incroyable car c’était comme si l’horizon s’ouvrait, pourquoi je n’avais pas trouvé ces choses là avant !
Qu’est-ce que l’on peut faire de plus que changer l’autre ? C’est l’adoration. Je me communique avec la lumière, je rencontre des autres êtres à mon niveau. Une fois que le métal est devenu or, la pierre philosophale et l’or sont à la même hauteur. Je commence à voir dans chaque être mes propres valeurs et je rentre en contact avec la lumière des autres. Les autres commencent à me donner, on chante en chœur. Nous sommes en adoration de ce miracle qui est d’être vivant. Il n’y a pas de miracle plus grand. C’est un état de remerciement continuel d’être là. De voir avec toutes les richesses, d’écouter avec toutes les richesses qu’a l’oreille, de renifler avec toutes les richesses qu’a le nez. Le toucher, l’existence, la nourriture, la danse, la créativité sont des mondes énormes qui s’ouvrent devant nous. Nous sommes en adoration devant cette existence et devant nous-mêmes car nous sommes une œuvre miraculeuse. C’est un vrai miracle d’être ici. Quelle merveille !

J’étais en Inde et il y a eu une tempête alors j’ai mis la syllabe « Ram » dans la tempête. La tempête faisait « Ram..Ram.. » J’ai compris ce qu’était une syllabe, le son initial de la création. Quand la pluie s’est arrêtée il y a eu un silence et toute la nature s’est mise à chanter, puis il y a eu un autre silence et le vent s’est levé. Je me suis rendu compte que tous les bruits dans la Nature sont comme un concert avec des bruits qui vont, qui montent, qui descendent, qui se taisent, qui crient en parfaite adoration de la vie. Et c’est pour cela qu’il y a des ragas qui doivent être chantés le matin et pas la nuit et ceux qu’on chante la nuit ce n’est pas le soir. On ne chante pas une chanson à n’importe quelle heure. Chaque chanson a son heure d’adoration et chaque heure a un nom spécifique avec son être. L’être de midi ce n’est pas l’être de 3 heures de l’après-midi. Alors on adore le Temps car c’est notre initiateur et on le respecte, il va avec nous. C’est ce que dit quelqu’un en état d’adoration. Et le moi dans l’état d’adoration, que l’on défend avec une telle susceptibilité et une auto complaisance, disparaît là. Il n’a rien à faire là

  • maître, ouvrez-moi
  • qui est là ?
  • moi
  • il n’y a pas de place pour moi ici
  • maître, ouvrez-moi
  • qui est là ?
  • moi..
  • va-t-en

une année après :

  • maître
  • qui est là ?
  • toi
  • entre !

Le moi individuel est là mais il s’ouvre comme une fleur avec des pétales impersonnels et c’est l’adoration de l’existence. A ce moment là on se dit : mon dieu, il faut que j’arrête de critiquer les autres pour exister, moi. Je n’ai pas besoin d’être jaloux du succès de l’autre pour exister. Quelle joie que tu sois riche, quelle joie que tu triomphes. Je n’ai pas besoin d’être agressif car je suis plein de cette lumière d’adoration. Je suis en relation avec tout ce qui existe, même une mouche. Quelle merveille ! On est dans un monde merveilleux, même s’il nous mange.

Quelle est la position n° 5 ? :

C’est un autre degré plus beau encore ! Il dépasse tout. Le premier c’est la persistance, le 2 c’est la métamorphose, le 3 c’est la transmutation, le 4 c’est l’adoration. Maintenant, écoutez bien car je vais vous donner la bonne nouvelle.
Une fois qu’on est arrivé au 4 dans cet état d’adoration, il y a un état encore plus merveilleux qui est le retour. Quand on atteint l’impersonnel tout d’un coup on revient à la personnalité qu’on habitait pendant la persistance. On devient de nouveau un être humain. Tout redevient pareil, mais sans angoisse. On perd l’angoisse. On est un raté sans angoisse, on est gros en adoration sans angoisse, on est laide en adoration sans angoisse, on est pauvre en adoration sans angoisse, on est riche en adoration sans angoisse. On est comme on est. C’est tout, mais sans angoisse. Tu laisses tout de côté et tu l’acceptes en adoration, en plein remerciement d’être ce qu’on est. J’avais des complexes intellectuels terribles, surtout que je vivais au Chili où chaque citoyen est un génie ! ils sont tous pareils et surtout mieux que les autres… Je me suis dit que l’intelligence que j’aie c’est tout ce que j’ai. Je vais aimer mon intelligence, même si elle est petite. Je ne suis pas Kant, je ne suis pas Wittgenstein, mais je l’aime. C’est à ce moment là que j’ai commencé à avoir des pensées agréables. Mais l’école te donne des notes, mais ce qui ne mérite pas de notes c’est l’intelligence. Dès que je rentre dans un magasin, comme j’ai un accent, je suis un crétin et le vendeur s’efforce de me montrer que je suis un idiot. La conversation française n’est que cela : « tu t’es trompé, tu es bête, tu dis cela mais ce n’est pas comme ça, tu n’es pas logique parce que.. ça se dit comme ça, cela ne se dit pas comme ça. » On est dans une attitude cartésienne d’intelligence constante et on est hyper intelligent ! Voyez les philosophes actuels pour dire intelligemment des bêtises, ils vont parler intelligemment des derniers évènements politiques, avec un grand verbiage en étalant une intelligence qui ne sert à rien ! Je préfère avoir une petite intelligence qui est utile.

Ici c’est comme au théâtre, si je n’exagère pas, l’effet ne rentre pas. Bien sûr il y a des philosophes qui sont merveilleux et il y en a des idiots. Il faut prendre ce que je dis jusqu’à ce que ce soit utile et après il ne faut pas le prendre.

Il reste encore un sixième état :

On tombe dans la transe. Les mots parlent à travers toi, tu es parlé. Ce n’est pas ta joie, c’est la joie de la vie, l’amour ce n’est pas le tien, c’est l’amour universel, les pensées ne sont pas les tiennes, elles sont créées par la collectivité peut-être l’Histoire. On est dans un état de réception constante, de communication de ce qu’on reçoit. On dirait que la personne devient une porte qui s’ouvre devant une autre réalité et à travers elle la réalité parle. Par exemple, toutes les guérisons de Milton Eriksson ont été faites en transe, en hypnose. Les maîtres Zen font des réponses qui viennent du plus profond de leur ventre, mais ce n’est pas leur ventre, c’est la force originelle qui parle à travers eux. Par l’être humain parlera l’esprit. Ce sont les prophètes qui sont dans le degré 6. Les artistes peuvent arriver au degré 6. Celui qui a fait les Tarots était dans le degré 6, car c’est un art reçu. Kabbale c’est ce qui est reçu.

Cassette enregistrée et prêtée par Denis Patouillard Demoriane
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays.