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110 : je ne sais pas qui je suis, mais je sais comment je me sens : Extrait de la conférence du 20 avril 2010

Pour tous ceux et celles qui n’ont pas eu la chance d’assister au Cabaret Mystique d’Alejandro JODOROWSKY.

Il n’y a pas de choses minimes ou de grandes choses, un minime changement c’est bon.
Quand j’ai commencé à donner ces conférences, je parlais de choses très importantes, je commençais à analyser les cartes du Tarot qui sont très profondes, puis les livres sacrés, le Tao Te King, la Bhagavad Gita, les koans zen, les livres hindous, le Yi Jing, Patanjali, les Védas, et au bout d’un moment je me suis rendu compte que l’interprétation que je donnais était à la hauteur de ce que moi je voyais.

Les textes sacrés sont une richesse, mais c’est toi qui donne la richesse par ton interprétation. Parce qu’on peut les interpréter de mille façons. Alors je me suis rendu compte qu’on peut tout interpréter, tout est sacré, et c’est comme cela que j’ai commencé à interpréter les blagues, les blagues ordinaires.
Ce qui est méprisé n’est pas forcément méprisable. Je le dis aussi pour moi. A l’école j’étais vraiment méprisé, j’étais un étranger. Mais je n’étais pas méprisable, cela m’a sauvé. Je n’ai pas écouté le mépris. Les blagues ne sont pas méprisables, elles sont méprisées.

La première partie de ma petite conférence, c’est 10 petites blagues que je vais commenter :

C’est un homme un peu maigre, petit, qui rentre chez lui et sa femme est en train de coucher avec un énorme lutteur de catch. Alors il a une colère incroyable, il devient tout rouge, il se prend les pied dans le parapluie que l’homme avait amené, il prend le parapluie, le casse et dit : "Maintenant je suis sûr qu’il va pleuvoir."

Au lieu de casser la gueule au type, il casse le parapluie ! Elle est intéressante !
Devant certain problème, au lieu de confronter le problème, nous déchargeons notre colère dans des petites maladies, des petites réactions, des petites dépressions en pensant que le ciel va solutionner le problème. Je recommande quand on a des problèmes avec des familiers, des personnes, des chefs, de faire une confrontation : voilà ce que tu m’as fait, voilà ce que j’ai ressenti, et voilà la réparation que je veux, cela coûte tant.
Quand mon fils à fait une confrontation avec moi, il m’a demandé 8 millions de dollars. Je lui ai fait le chèque, qu’il a toujours, qui n’a qu’une valeur, celle de la reconnaissance de dettes. J’ai reconnu que j’avais commis des erreurs avec mon fils, et c’est ça qui compte.
Parce que quand les personnes ne reconnaissent pas leurs erreurs, tu casses le parapluie, et tu attends que le ciel te venge ! Et tu vis toute ta vie rouge en déchargeant tes colères sur des personnes-parapluie qui n’ont rien à voir !

Un petit vieux s’engueule avec son marchand de poisson, il a plus de 75 ans et sa femme a 30 ans, "Vous m’avez vendu une douzaine d’huitres ; espèce d’escroc, vous avez dit qu’elles étaient aphrodisiaques. Vous vous êtes foutu de ma gueule !" "Comment ça ? Les douze huitres ne vous ont fait aucun effet ?" "Si, mais 4 fois seulement."

On n’est jamais content ! La vie est un miracle, mais on n’est jamais content de ce qu’on a. Moi, chaque matin quand je me réveille je dis, "Merci, je suis vivant !" On doit être content de ce qu’on a. Je donne un exercice : pendant 5 minutes, pas plus : tu vas arrêter tout et tu vas penser que tu es mort. Je n’aurais pas une minute de plus de ce que j’ai maintenant, je ne serai pas pire, pas mieux, c’est tout ce que j’ai, là. En ce moment c’est tout ce que je suis. Fini l’espoir du futur, c’est ça que je suis et c’est comme ça que je finis. C’est la reconnaissance de ce qu’on est dans le moment présent. Et reconnaître ce qu’on est dans le moment présent, c’est miraculeux.

Un homme arrive à la loterie , il a gagné le prix. Il n’est pas content, pourquoi ? "J’ai acheté 2 billets, celui là a gagné, mais celui là n’a rien eu"

Un touriste belge est en vacances à l’étranger, il entre dans un bistrot et déclare : "Vous n’auriez pas un bout de fil de fer ? Je n’arrive pas à ouvrir la portière de ma voiture, mais comme la vitre est un peu baissée, je voudrai essayer d’attraper la poignée intérieure" On lui donne un fil de fer.
Il retourne à sa voiture et essaie de crocheter la portière en se contorsionnant comme un beau diable. Au bout d’un moment il entend une voix qui vient de l’intérieur de la voiture sa femme, qui lui dit : "Un peu plus à gauche."

On essaie d’ouvrir la porte de l’illumination, la porte qui va faire tomber toutes les limites qui nous font souffrir, on essaie, on se tord, et tout d’un coup l’âme nous dit : "Mais je suis là ! il n’y a pas de porte à ouvrir, vois moi !" Pourquoi on a tellement peur de se voir, cette terreur de se voir ? Il y a des énormes réactions : l’inconscient n’existe pas, et c’est fini, la psychanalyse s’est trompée, il n’y a pas d’inconscient, bon.....on ne veut pas se voir, pourquoi ? Si on se voit et si notre souffrance diminue on perd l’individualité, ce qui confirme notre appartenance au clan familier. On n’est pas prêt à changer, on veut changer, on sait qu’on peut mais on ne veut pas, on résiste. Plus que la peur de mourir, on a peur de perdre la mémoire de l’individualité, et on la défend, "non, mais tu ne va pas me changer, je suis bien, (malgré ma souffrance terrible), j’ai envie de me suicider mais je suis bien."
On est comme un Belge avec l’âme dans la voiture. C’est clair ?

Un brave mari est excédé de voir sa femme dormir les jambes écartées et prendre toute la place dans le lit nuptial. Un beau jour il lui dit : "Si tu continues à dormir les jambes écartées, tu vas finir par perdre tes tripes !" Elle rigole. Lui décide d’aller jusqu’au bout, va acheter un chapelet de saucisses à la charcuterie, et un matin avant de partir au bureau, il dépose tout ça entre les jambes de sa femme qui sommeille encore. Deux heures après, il reçoit un coup de téléphone : "Allo, c’est toi chéri ? C’est terrible mon chéri, tu avais raison, je me suis réveillé, j’avais perdu toutes mes tripes ! Si tu savais le mal que j’ai eu à les faire rentrer !"

C’est un avertissement à ceux qui veulent faire de la Psychomagie. Je donne des conseils de Psychomagie pour sortir des problèmes, mais il y a des personnes amateurs qui essaient de m’imiter. Mais pour donner un conseil de Psychomagie, il faut savoir à qui on le donne, comment on le donne.
Par exemple : Il y a des gens qui vivent des vies terribles, ils n’ont rien dans la vie. Bon, alors il faut mourir... et renaître. Tu fais un tombeau, tu te mets dans un drap, tu te couches, pas trop profond, tu laisses le visage à l’air, et quand tu sens que tout s’est dissous de ta vie antérieure, tu laisses venir un nouveau nom, tu dis : "Et maintenant, sortez moi." On te sors, on te baigne, on te met un costume complètement nouveau, tu te donne ton nouveau nom et tu commences une vie différente. C’est une solution. Mais j’ai un élève, un imitateur, qui à la personne faisait acheter une pierre tombale, faisait graver son nom, alors la personne reste enterrée pour toute sa vie.

On fait des erreurs : j’ai dis à une personne "Ecoute, tu projettes ta mère sur ta femme, et tu sens quelque part que ta mère ne t’aime pas, et ta femme ne t’aime pas parce que tu projettes. Alors tu vas faire un acte de Psychomagie : tu vas acheter un bouquet de fleurs, pour l’une et pour l’autre, deux bouquets et deux boîtes de chocolat, et tu les donnes à ta femme et à ta mère. Alors ton inconscient va comprendre la projection que tu fais sur ta femme et tout va s’arranger. La personne s’en va contente et fait le travail. Il a fait : deux bouquets mais un différent pour sa femme, et deux boîtes de chocolat, une de chocolat noir une de chocolat au lait. L’inconscient a compris qu’il faisait une différence entre sa femme et sa mère, donc ça ne peut pas marcher à 100%. Quand on reçoit un conseil il faut le suivre, car il y a une opposition avec la manifestation du problème. On a une opposition à ce que cela disparaisse. On ne veut pas guérir : on veut en finir avec le symptôme. Alors on traîne le problème, on ne s’occupe que du symptôme, mais on ne va jamais au centre du problème.

Bon, la dernière... sur l’ego. L’ego croit qu’il est en communication mais il est enfermé dans un bunker. On ne vit pas dans un temple, on vit dans une forteresse.

Un touriste s’est perdu dans la montagne, il arrive devant une toute petite cabane, il frappe à la porte en criant : "Il y a quelqu’un ?" Une voix d’enfant lui répond "Oui !" Le gars demande : "Ton papa n’est pas là ?" "Non, il est sorti juste avant que maman rentre." "Alors ta maman est là ?" "Non, elle est sortie avant que je sois arrivé." "Mais alors vous n’êtes jamais ensemble dans cette famille ?" "Non, pas ici, ici c’est les chiottes !"

Voilà, on est tout seul dans ses chiottes personnelles !

Aujourd’hui c’est ma dernière conférence... qu’est-ce que je peux transmettre ? Qu’est-ce que je sais ? Parce que je sais que je ne sais rien. Est-ce que je sais des choses que je puisse transmettre ? De quel droit on se met dans la position à donner une conférence ?
Je sais qu’il y a des choses que je ne sais pas, mais à côté de ça je sais qu’il y a des choses que je sais.
Alors on va commencer par : je ne sais pas qui je suis. C’est le problème central du bouddhisme : qui je suis ?

Quand Boddhidarma arrive en Chine, il va voir l’Empereur, celui-ci lui dit : "J’ai fait des milliers de monastères, traduit des milliers de sûtras, quel est mon mérite ?" Boddhidarma lui répond : "Je ne sais pas, il n’y a pas de mérite." "Qui es-tu pour me dire ça ?" "Je ne sais pas non plus. Je ne sais pas qui je suis."

A partir du moment où on sait qui on est, on a une distanciation de soi, on a une dualité. Mentalement on a une dualité tout le temps je me vois agir. Pendant des années je me suis vu parler, agir, je ne savais pas ce que c’était la transe. Quand on est en transe on agit, mais on ne remarque pas ce qu’on fait. On fait l’acte, après on ne se rappelle pas, comme un rêve. On parle, "on est parlé," on ne sait pas qui on est. A partir du moment où on sait qui on est, on est carré, on est limité, on ne grandit pas.
L’univers est en continuelle expansion, si notre esprit n’est pas en continuelle expansion, on recule et on pourrit. Gurdjieff disait : "On est mort en vie." Il y a des personnes dans la rue qui sont mortes déjà parce qu’elles ne progressent plus, leur cerveau est fermé. Ces personnes savent qui elles sont, "je suis comme ça, je ne peux pas changer."
A tous moments on peut changer énormément, à tous moments on peut commencer tout de suite à se libérer.

Alors je ne sais pas qui je suis, mais je sais comment je me sens, ça je le sais, et ça, c’est la clef ! Toute la nouvelle psychanalyse de la Gestalt cherche à savoir comment tu te sens. La première chose que te demande le psychanalyste, c’est comment tu te sens, c’est cela l’important. Vivre et se juger du point de vue de l’intellect n’est pas vrai, ça ne sert pas. Mais vivre en te demandant comment tu te sens, à ce moment là tu es dans ta vérité.
L’authenticité des sentiments, cela t’aide. Alors, cherchons comment nous nous sentons.

Je sais comment je me sens intellectuellement, comment je me sens émotionnellement, sexuellement - créativement et je sais comment je me sens corporelllement. Et je sais comment je me sens dans ma cinquième essence, dans mon être essentiel.

C’est ça le travail, il faut libérer comment tu te sens.

Là je vous parle de mon intellect, si je vous parlais de mon corps cela serait différent. J’ai dû venir ici, j’aurais préféré être au lit en train de me reposer ! Là c’est le corps qui parle..... Miraculeusement je me sens bien car ça me plaît d’être en contact avec d’autres corps, avec 150 cœurs, 80 couilles, du sang qui circule, je me sens bien !
Quelle merveille ! Juste mes chaussures qui me font un peu mal : il faut qu’il cesse avec son complexe infantile de ne pouvoir rentrer dans un magasin ! A moi on doit acheter tout ! Je ne suis pas capable de rentrer dans un magasin ! C’est pas possible !
Miraculeusement, je respire bien puisque je suis devant vous, les poumons marchent.
Comment je suis, comment on me voit ? Je sens le poids de mes fesses ! C’est pas mal...
Le corps peut parler, il peut te dire ce qu’il a : "Je suis content parce que tu me fais manger bien, j’ai attendu des années pour manger enfin comme je voulais. Il a fallu que tu perdes la vésicule pour enfin comprendre que tu dois me nourrir bien !! Alors je suis content."

Je peux dire que créativement - sexuellement, je suis satisfait, je ne peux pas me plaindre. Tous mes désirs sont satisfaits, la création cela va, il a de l’énergie encore, je suis bien.

Cela ne fait pas longtemps que j’ai appris à aimer... j’ai mis des siècles pour pouvoir aimer, des siècles. Je ne savais pas aimer. Je voulais qu’on m’aime, tout le temps, c’est l’émotionnel qui parle. Parce que ma mère ne m’avait pas aimé, je ne savais pas ce que c’était d’être aimé, et je voulais être aimé. Jusqu’au jour où l’intellect a dit : mais tu n’es pas un chat qui cherche des caresses sans arrêt. Arrête de te préoccuper de la caresse, caresse toi ! si tu veux être aimé, aime-toi ! Ouvre la porte ! Je ne suis pas vide, on n’a pas le cœur vide, simplement on a le cœur blindé ! Ouvre la cuirasse ! Aie la foi que le monde ne peut pas être changé mais que tu peux commencer à le changer. Tu peux commencer à créer ta réalité, à te réaliser, les miracles existent ! A tout moment accepte, ne te laisse pas guider par la raison, laisse toi guider par l’intuition.
J’ai compris ce que mon cœur, mon corps, mon intellect, ma créativité - sexe m’ont dit. J’ai appris à me taire, quand il n’y a rien d’important à dire, je me tais !
Aucun mot ne peut rentrer dans mon ciel bleu de midi, aucun. Je sais me taire, je sais comprendre, je sais recevoir, je sais donner. Je sais que chaque idée a son contraire. Comme disent les Espagnols "Chaque mouche a son ombre" Si j’affirme une chose, j’affirme immédiatement son contraire. Je dois comprendre ça, et aussi que les choses qui ne doivent pas se dire, il ne faut pas les dire.
Si je dois parler de Dieu, Dieu pour moi, c’est l’impensable, donc, on n’a rien à dire.
Si on doit parler de ça je te demande de l’aide. Corps émotionnel qu’est-ce que tu ressens du divin ?

On a demandé à Ramakrishna s’il croyait en Dieu : "Non." Comment, vous un grand mystique ?!" "Je ne crois pas en Dieu parce que je le connais, je le sens"

Ce sont des choses qui se sentent...

Alors on a parlé beaucoup de télépathie, avec le Tarot j’ai développé un peu de télépathie. Avant je croyais que la télépathie c’est écouter ce que les personnes ont dans la tête, dans les mots. C’est impossible parce que les mots n’existent pas, ils sont éphémères, c’est un son. Mais ce qu’on peut capter, c’est ce que l’autre ressent. La télépathie c’est de cœur à cœur, c’est pas de tête à tête.

Alors comment je me sens ? C’est la question que chacun doit se poser.
Et mentalement, intellectuellement ? Moi ça va. Est-ce que je développe des pensées sans cesse ? Est-ce que je juge le monde à travers mon intellect ? N’y a-t-il pas une autre chose à part les mots ? Est-ce que je sais bien que les mots contiennent des mots et des autres mots ? Et l’unique racine des mots c’est cet impensable qu’on appelle Dieu. C’est la force indéfinie qui soutient l’univers, dedans chaque mot. En rentrant dans un mot tu peux arriver à la source de l’univers. C’est un travail, le cabaliste devient fou en le faisant !
Est-ce qu’on peut faire le silence mental ? Ne pas se juger, faire le silence. On peut le faire ? Donc on commence à vivre. L’intellect veut être, il faut lui apprendre à ne pas être. A se dire je suis un rêve, une illusion, mais je ne suis pas l’Être.

Et qu’est-ce que j’ai dans le cœur ? Est-ce que je me sens aimé ? Est-ce que je suis en union avec le monde ? Où est-ce que je sens que le monde c’est un lieu terrible, ça va mal partout, on vit dans un monde terrible. Est-ce que je me rends compte que le monde est une merveille et qu’il y a de la violence dans le monde mais que la violence ce n’est pas le monde. Je ne dois pas définir les choses pour ce qu’elles ont mais pour ce qu’elles sont.
Le monde est une merveille. Le calice est une merveille. S’ il est plein d’ordure on le nettoie et le calice d’or c’est une merveille. Et moi aussi j’ai beaucoup d’ordures en moi, tout ce qu’on a gravé, tatoué, mis dedans. Mais ça c’est pas moi ! Ce que je porte, les blessures que je porte, les abus que je porte, les marquages que je porte, les mauvaises expériences. Ce n’est pas moi ! Les souffrances c’est pas moi ! C’est une époque de ma vie. Quand j’étais enfant je souffrais, c’est la souffrance de mon enfance, mais ce n’est pas la mienne. Me sentir seul et abandonné, ce n’est pas ma réalité.

J’ai donné un acte de psychomagie à quelqu’un qui est bipolaire, qui se déprime et après est euphorique, à Barcelone, (de la famille de Neruda, le poète communiste), il a failli être égorgé etc. Je lui dis : "Mets une chemisette ici avec tes grands-parents (communistes) prends une anthologie de Neruda qui viens de sortir en Espagne. Avance sur les Ramblas (avenue à Barcelone) en lisant pas à pas les poèmes de Neruda. Chaque fois que tu finis un poème, tu jettes la page. Jusqu’à ce que tu arrives à la mer, quand tu arrives à la mer, lance à la mer le livre et chante l’Internationale avec une voix d’enfant. Et après tu enlèves cette chemise et torse nu, tu remontes les Ramblas." "C’est interdit de se promener torse nu, jeter des papiers c’est interdit" me dit-il, "on va à la police !" Le miracle arrive, la danse de la réalité arrive et personne ne va rien te dire, et personne ne lui a rien dit, un monsieur a ramassé une feuille et a dit : "Merci pour ce poème." La police ne l’a même pas regardé ! Et quand il s’est promené torse nu, la première personne qu’il rencontre c’est un autre gars torse nu à qui il manque un œil. Il s’est senti en communication avec le monde tel qu’il est. Le monde n’est pas ce qu’il a été, ce qu’il sera, le monde est ce qu’il est !
Et le monde qu’est-ce que c’est ? C’est un mixage de ce qu’il est et de ce que je projette.

Comment je me sens émotionnellement ?
Est-ce que la personne qui vit avec moi me plaît ? Est-ce qu’elle me rend la vie gaie ? Pourquoi je vis avec une personne qui ne me rends pas la vie gaie ? Dehors ! Pourquoi je supporte ça ? Le but des relations c’est se rendre la vie gaie.

Un homme arrive avec un eczéma sur le côté gauche, je lui demande "Tu es marié ?" "Oui"
"Depuis combien de temps ?" "30 ans" "De quel côté dort ta femme ?" "Gauche" "Bon, change de côté" Quelques jours après : "J’ai l’eczéma du côté droit"
On est pas bien dans sa peau, on n’est pas content. L’eczéma c’est la manifestation qu’on vit une relation abusive et qu’on doit se guérir de cette relation.

Est-ce que tu aimes les objets qui t’entourent ? Vois les objets... Il y a des personnes qui pensent que parce qu’on leur fait un cadeau il faut le conserver.
Bouddha faisait circuler les cadeaux. Pour moi les cadeaux ne sont pas pour moi, c’est pour qu’on les fasse circuler. Si on me fait un cadeau qui ne me convient pas je le fais circuler, ça peut convenir aux autres.

Il y a un fou qui est arrivé chez moi au Mexique, il me dit : "J’ai rêvé que tu étais mon gourou" alors il est arrivé avec des fleurs. Je lui dis : "Écoute, je ne suis pas un gourou, mais c’est bien que tu viennes vers moi car j’en connaît un qui s’appelle Ejo Takata qui est un Japonais qui sera ton maître. Alors moi simplement je suis l’intermédiaire entre toi et le maître." Je l’ai amené et il est devenu moine Zen. Je suis l’intermédiaire.

Il y a un peau-rouge dans un bar aux USA qui demande : "Une bière." On lui donne, il va dans les WC et la verse dans la cuvette. "Une autre bière" Six fois il verse la bière dans les WC. "Mais pourquoi vous faites ça ?" "Parce que moi je suis digne, je ne veux pas être l’intermédiaire."

Mais ça c’est l’ego, il ne veut pas être l’intermédiaire. Si quelqu’un vient avec les fleurs, l’ego bien sûr prend les fleurs, mais bien sûr tu es mon élève, travaille pour moi, vas vendre des trucs pour moi, il profite l’ego ! Quand on te fait une projection, il la prend.
La personne libérée, pas de l’ego parce que l’ego c’est important, mais qui a dompté son ego, un ego bien dompté, elle est intermédiaire. A chaque personne elle dit, vas faire ça, car ce n’est pas pour moi.

Je l’ai appris d’une histoire du Bouddha chinois.
Il y a des gens qui viennent voir Bouddha et qui lui disent : "On a une servante qui a un très mauvais caractère, venez la pacifier" Alors Bouddha va la pacifier mais il n’y arrive pas. "Ce n’est pas pour moi, c’est pour mon fils" Il envoie son fils et son fils la guérit !
Même Bouddha devient intermédiaire.

Et dans la créativités - sexualité, est-ce que je suis satisfait ? Est-ce que je suis en train de créer, en affaires, une activité, un art ? Où est-ce que je suis un imitateur ? Il y a peu de créateurs mais énormément d’imitateurs. Les imitateurs ne sont jamais satisfaits. Regardez tous les imitateurs d’Elvis Presley, imiter est un drame pour eux. Être soi-même est difficile. Trouver son identité. Mais ça vaut la peine.
Moi j’ai fait plusieurs art, dès 15 ans j’écrivais des poèmes. La première fois que j’ai écrit un vrai poème c’est à 60 ans ! J’ai mis 60 ans à me trouver moi-même. Il y avait tellement de grands poètes que c’était le complexe absolu ! Pour arriver à me trouver et cesser d’imiter, c’était une éternité. Mais j’ai joué le jeu, je me suis donné le travail. Il faut se donner le travail pour se trouver soi-même. Il faut accepter qu’on n’est pas satisfait. Mais si i on est satisfait, c’est une merveille.

Et physiquement, dans le monde matériel, comment ça va ?
On peut soigner son corps, d’accord. Mais est-ce que tu gagnes ta vie ? Est-ce que tu dépends d’une bourse, de tes parents, de tes amis ? C’est essentiel ! Les femmes qui parlent tellement de ne pas être esclave de l’homme, la première chose à faire, c’est se libérer économiquement. Avoir sa place, son lieu privé à soi, quand on veut, devenir indépendant. Si on est pas indépendant, on est pas vraiment soi-même. On peut faire une société à plusieurs, mais l’indépendance doit se trouver.

Je ne sais pas ce que je vaux, ma valeur, je ne la connais pas. Si je la connaissais, je serai vaniteux, mais je sais ne pas me comparer, pas faire de comparaisons. Quand on se compare, on n’est pas soi-même, cela n’a pas de valeur.
Je voulais faire un film dans lequel Salvador Dali devait jouer. C’était un acteur qui se comportait comme un roi, il avait une cour. On se rencontre un jour dans un restaurant, j’étais plus jeune que lui bien sûr, il m’assoit à sa droite, et il me dit devant tout le monde, il me met à l’épreuve : "Quand on était jeune comme vous, moi et Picasso, on allait à la plage, et chaque fois qu’on descendait de la voiture on trouvait une montre ; est-ce que vous avez trouvé beaucoup de montres à la plage ?" Il fallait réagir, parce que si je disais que j’avais trouvé beaucoup de montres "Ha, Ha, Ha" on dira : Il se met comme le maître, pour qui il se prend ! Si je dis que je n’en ai trouvé aucune "Pauvre diable, qui c’est ce gars ?" C’était terrible ! Cet innommable qu’on appelle Dieu m’a envoyé la réponse et tout le monde s’est tu, j’ai dit : "Non, je n’ai trouvé aucune montre, mais j’en ai perdu beaucoup !" C’était un moment... le meilleur moment de ma vie ! Il m’a dit : "Bon, je vais travailler avec vous"
Lisez mon livre "Mu, le maître et les magiciennes" où je raconte comment je me suis cassé la tête avec les devinettes Zen, à trouver les réponses aux koans...
Je ne sais pas ce que je vaux, mais je sais ne pas me comparer.

Je ne sais pas où je suis, qui peut savoir où il est ? On ne connaît pas l’univers. On connaît 1% de l’univers. On ne sais pas où on est, je ne sais pas où je suis.
Mais qu’est-ce que je sais ? Je sais que je suis en moi, je sais que j’habite en moi, c’est la seule certitude que j’ai. Il faut savoir qu’on est l’habitant essentiel de sa vie.
Il faut parler plusieurs langages, une seule c’est une catastrophe. Le langage est un être, il te forme la pensée. Pour commencer à penser il faut au moins avoir deux langages. Pour faire des comparaisons. Avoir une nationalité très marquée, c’est bon pour le XXI ème siècle, encore. Pour le XXII ème siècle ça ne sera pas bon. Ce sera un tel mixage que ce sera bien autre chose que de défendre une nationalité.

Bon, je vais lire, sans commenter.

Je ne sais pas qui je suis, mais je sais comment je me sens.
Je ne sais pas ce que je vaux, mais je sais ne pas me comparer.
Je ne sais pas où je suis, mais je sais que je suis en moi.
Je ne sais pas où je vais mais je sais avec qui je vais.
Si tu vas avec des personnes qui te remplissent, c’est le paradis.

Je ne sais pas si j’ai une maladie, mais je sais comment l’éviter.
Comment éviter les maladies ? Toutes les maladies sont des interdictions infantiles, où on nous a obligé à faire des choses qu’on ne voulait pas. Je t’interdis de faire ce que tu aimes, je t’oblige à faire ce que tu n’aimes pas. La maladie, c’est un appel à la compréhension.

Je ne sais pas si je t’aime, je ne sais pas ce que c’est, mais je sais que je suis heureux de ton existence.
Être heureux de l’existence d’une chose, c’est l’aimer.
L’amour sans possession c’est l’amour. C’est le bonheur que la chose existe. Tu n’es pas à moi mais je suis heureux que tu existes.

Je ne sais pas ce que c’est le monde, mais je sais qu’il est à moi.
J’ai appris ça quand je vivais dans la misère, je vivais à Joinville-le-Pont. Dans la rue il y avait des bacs de ciment où la municipalité avait mis des plantes. Beaucoup de gens faisaient chier leur chien là. Un jour à 6h du matin, je vois une vieille dame qui arrose les plantes et enlève les crottes de chien. "La municipalité vous paie ?" "Non, c’est ma rue, je la nettoie."
Si tu prends possession du monde, tu ne vas pas commencer à le salir !
Moi j’ai pris possession de l’humanité. Parfois je critique les individus, mais l’humanité est une merveille. On va aller très loin, on va connaître une vie longue, longue, on va connaître le mystère de l’univers, on va créer des mondes, c’est l’humanité, alors l’humanité est à moi et je l’aide. Je prends possession.

Je ne sais pas comment vaincre, mais je sais m’échapper. Il y a un livre très peu connu mais qui est formidable, "Les 36 stratagèmes de la guerre chinoise" (utilisé par Mao !) et le stratagème le plus important, le n° 36, c’est s’échapper, c’est la fuite ! C’est génial ! Savoir s’échapper !

Je ne sais pas éviter les coups, mais je sais résister aux coups.
J’étais ami d’un écrivain mexicain qui était président de la fédération de boxe, il m’a illuminé, il m’a dit : "Écoute, ce n’est pas le boxeur le plus fort qui est le champion, c’est celui qui résiste le mieux aux coups." La boxe est un art de résister aux coups.

Je ne sais pas ce que je fais, mais je sais que ce que je fais me fait.
Je peux dire que je ne sais pas faire l’amour, mais je laisse que l’amour me fasse.

Je ne peux pas changer les autres, mais je peux commencer à me changer moi-même.

Je ne sais pas ce que je sais, mais je sais ce que je ne sais pas.

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